31.12.07

Tout est toujours possible puisque l'année en cours se termine...
Que se passera-t-il le jour où il n'y aura pas de fin ?

24.11.07

Suite en cours

Elisabeth avait haussé les épaules : c’était vraiment simplet, elle venait d’ouvrir un ouvrage du goujat, elle y écrivit d’un trait de crayon rageur le mot « idiot » en marge de la page trente-cinq où le texte déroulait : Quand au cours du combat, ta chair me submerge, je défaille dans tes bras, ivre de ton parfum, à moitié asphyxié, en fait, je reçois la vie et je meurs de bonheur, au terme de la lutte je t'offre ma dépouille, celle superbe et désirable de la belle au bois dormant qui s'offre au prince des violeurs, me voilà suprême gibier pouvait-elle dire, d’une seule traite. On dirait du Mertens.

Puis elle se rendit compte qu’elle le rendait responsable de sa propre déception, de son enflammement, de sa fougue si souvent, si habituellement récompensée, ici bafouée. Cochon de secrétariat ! Putasserie d’administration. C'est très émouvant de parler à un mur des lamentations se dit-elle en regardant la peinture du corridor. Tiens, pensa-t-elle, cela s’écaille ici, il faudra que j’en avise le propriétaire.


Un moment se passa où la vie s’écoula, Simplement d’heures en heures il y avait comme une sorte de manque. Des journaux, des revues parlaient de lui, il était difficile de ne pas le voir ici à la rubrique littéraire, là dans une actualité féroce de tabloïdes annonçant sa liaison avec Victorine Mounier.
Un soir qu’elle relisait, une fois de plus ce « Rendez-vous à Colmar », elle buta sur une citation :
Chez l'homme l'espoir dépend simplement des actions de ce qu'il aime; rien de plus aisé à interpréter. Chez les femmes l'espérance doit être fondée sur des considérations morales très difficiles à bien apprécier. La plupart des hommes sollicitent une preuve d'amour qu'ils regardent comme dissipant tous les doutes; les femmes ne sont pas assez heureuses pour pouvoir trouver une telle preuve; et il y a ce malheur dans la vie, que ce qui fait la sécurité et le bonheur de l'un des amants, fait le danger et presque l'humiliation de l'autre.
Et puis une autre ...
Comment ferai-je pour prolonger à mon gré ce récit si touchant et si simple ; pour redire toujours les mêmes choses, et n'ennuyer pas plus mes lecteurs en les répétant que je ne m'ennuyais moi-même en les recommençant sans cesse.

Décidément, se dit Elisabeth, je n’avale pas cet HB524, je vais le lui faire savoir !



HB524. Elle n’encaisse pas ! Trou du cul d’intellectuel intimiste ! Lui en foutrais moi des courriers des lecteurs ! Un lecteur, cela veut du concret, du brut, du simple. L'homme est caché derrière un arbre, la fille passe, il lui saute dessus, jusque là c'est sympa, c'est normal, c'est naturel, chacun des lecteurs se voit Robin des bois emmenant Marianne, Thorgal sauvant Anicia, les uns sont très primaires, très physiques et démontrent la puissance de leurs muscles, d'autres sont vêtus de soies et de jabots, ils courbent la tête et arrondissent un geste ample avec chapeau à plume, ils s'inclinent devant une baronne, une duchesse, une princesse. Ils sont jeunes, ils sont beaux ils sont éternels, quelques uns sont riches de la côte ouest, viennent de descendre de leur voiture italienne carrossée de rêve rouge, revolver au poing, ordinateur portable au cou, ils empêchent le délégué du Smersch de prendre les actions de l'orpheline. Elle, elle se pâme, se refuse, se donne, jeu immuable de la séduction, ici elle est quasi à poil, ailleurs emballée sous mille cotonnades ou des flaflas transparents qui ne sont que translucides et il faut tout de même déballer pour apercevoir un bout de peau, toujours pareil, noir, blanc rosâtre ou jaunâtre, une ligne de muscles ou des bourrelets adipeux, un jeu de jambes, de bras, de fesses, les jambes s'écartent toujours à un moment donné de l'histoire, foufoune à l’air ou provisoirement derrière un bouclier de soie jaune. Constance comme la Reine sera empalée par un dard mâle vigoureux et impétueux, toute l'histoire du monde tourne autour de la grotte qui donne la vie, éternellement.

Qu’est ce qu’elles lui trouvent toutes, connasses ! Et lui gnia gnia gnia, elles sont moches !


Rageusement Elisa jette sur le sol une de ces revues, Oggi, des Italiennes à grosses fesses ! Pff....




Rage ! rage, Vraiment elle enrage.
— J’enrage hurle-t-elle en silence face à la psyché de sa chambre. HB524.


Je voulais lui écrire mon émoi, lui raconter comment dès la première lecture son livre m’avait trouvée, la nuit, le jour, tout le temps quand je l’avais lu et relu.
Qu'était-ce ? D'où cela venait-il ? Pourquoi fallait-il que je le relise encore ? Et pourquoi me suis-je sentie obligée de lui écrire et même dans cette autre lettre, des paroles ... et une troisième non envoyée encore, que je n’enverrai jamais ...
Cela vient-il de lui, cela vient-il de moi, du livre ou de quelque chose d'autre qui n'a rien à voir avec nous, et on s'est trouvé là comme ça dans un tourbillon ... ?


Elle remarqua qu’une lettre non encore décachetée traînait sur le petit guéridon du hall, une facture sans doute.
C’était encore un mot de Marguerite. Sacrée Némo, elle aussi en surchauffe ?

Ma chérie,

Comme tu le sais, j’ai relié les documents que j’ai découvert dans la fameuse chemise rose et les ayant lus (certains deux fois plutôt qu’une – dis-donc, tu es une coquine un peu cochonne non ?) je les ai présentés à Monsieur Coquet, tu te rappelles de lui, un beau vieux toujours tiré à quatre épingles, moustache mille neuf cent, gilet et montre gousset en or, qui fonctionne ! Je l’ai sorti de ses rêveries autour des publicités pour le savon Lechat et quelques autres, il n’en n’est pas encore revenu de l’acceptation du patron de le faire gérer le département publicités. Il a tort, il est compétent et c’est grâce à lui que nos salaires sont payés avec régularité.
Je lui ai donc annoncé que j’avais besoin de son aide pour faire passer mon projet, la publication de la correspondance du chef et de Mademoiselle Kubly. J’en profite pour te dire qu’ici tu n’avais pas que des amies, on t’avait même baptisée Mademoiselle Qu. Et je l’écris comme cela alors que d’autres au popotin plus important l’ont rondement écrit cul comme ça se prononce. N’en sois pas vexée, ce serait te faire de la peine pour rien d’autant qu’il est très joli.
Je lui ai donc annoncé que j’avais besoin de son aide pour faire passer mon projet, la publication de la correspondance du chef et de Mademoiselle Kubly. J’en profite pour te dire qu’ici tu n’avais pas que des amies, on t’avait même baptisée Mademoiselle Qu. Et je l’écris comme cela alors que d’autres au popotin plus important l’ont rondement écrit cul comme ça se prononce. N’en sois pas vexée, ce serait te faire de la peine pour rien d’autant qu’il est très joli.

Après délibération colloque et référence à ses ancêtres, Cloquet laissa tomber la bonne phrase :
Je vais t’aider, ce serait un bon coup de pub, le titre devrait en être : La demoiselle s’emballe, Tome premier, la demoiselle déballée, tome 2, ...... tome 3. L’intrigue est sinon forte du moins accrocheuse en ces temps de castings et autres démonstrations de nullités



La suite de la lettre de Marguerite était fort peu intéressante, elle y parlait d’Elisa comme d’une provinciale (pour qui elle se prend cette tarée ? une lesbienne ?) et comment qu’elle parlait de Monsieur Belle !
.../...l’auteur, un bellâtre qui ne devait son succès qu’à quelques unes de ses conquêtes, elle sait tout de lui, écrivain, pas même académicien, elle en devient amoureuse folle en le voyant passer à la télé, elle décide de le rencontrer, elle va réaliser son rêve : tomber dans les bras d’un people, devenir riche, annoncer sur le plateau de Drucker qu’elle va aider le tiers-monde, demander à son amant de devenir son mari, de rédiger des pamphlets pour l’humanitaire en déroute, Arielle et BHL puissance dix..../...

Incroyable, que dit-elle-là ? Comme s’il avait effleuré un moment Elisa de partir à la conquête de Henri pour son argent, pour sa notoriété ?

.../...J’ai retrouvé des notes à lui, des notes de restaurants et d’hôtel et des notes à toi, peut-être des pages déchirées d’agendas, d’un carnet de bord, d’un diary book, tenais-tu un carnet intime ? une lettre non envoyée qui sait où ? tu avouais même n’avoir pas tout compris de certains de ses textes, et que d’ailleurs ce qu’il écrivait pour la députation européenne t’avais rien à en branler. S’il a lu cela, le pauvre, il a dû avoir un choc, mais il a lu pire, tu ne l’as pas ménagé, encore heureux pour nous qu’il ne nous ait pas fait d’infarctus.

Mais je ne veux pas vous importuner inutilement, écrivais-tu, je sais que j’ai bien des défauts, tous sans doute à vos yeux puisque je suis une femme, orgueilleuse et désordonnée.
Écrivez-moi un petit mot si vous avez envie que je poursuive. Un tout petit mot, un simple oui.
Je ne sais pas ce qu’il y avait en dessous, c’est tout raturé, assez illisible, il y est question peut-on croire d’une Andrée de Montherlant, d’une exaltée, d’une allumeuse, d’une schizo d’une parano d’une déglinguée qui se raconte des histoires.

C’est fou ! Elle déforme elle désinforme, Marguerite était donc l’hégérie que je n’avais pas soupçonnée, pensa Elisabeth. Elle ne sait rien d’Henri et de moi. Elle n’imagine que le lucre, le sexuel. La diplomatie, l'argent ou l'occasion peuvent faire ouvrir un vagin, mais ils ne peuvent le réchauffer de tendresse comme fait l'amour. L'amour seul fait naître ce chaud rêve romantique qui adoucit et emmièlise la chair de la femme où l'homme s'engloutit tout entier.



Qu’elle publie ce qu’elle veut, je sais toutes mes lettres, toutes mes démarches, je sais qui j’ai été, comment je l’ai été, je connais par cœur les mots qu’il m’a écrit, j’ai dans la tête toutes les phrases qu’il m’a dite.
Il est en moi, ragea Elisabeth, il est à moi.


Elle se redresse. Elle réfléchit l'espace de quelques secondes. Elle se lève, se dirige vers sa chambre, grimpe sur lit pour se hausser, elle attrape la valise, rangée sur le haut de la garde-robe, d’un geste vif, elle la jette sur la courtepointe. Elle a décidé de partir.
Ouvrir la valise. Les gestes sont nerveux, les serrures rechignent. Se changer. Elle quitte cette sorte de salopette grise qu’elle portait, la dépose au pied du lit.

Éternel féminin, elle se mire dans la grande glace fixée sur la porte centrale du bahut.
Elle se sait jolie, elle l’est encore plus avec ces dessous noirs.
Elle ne va pas voyager avec cela, elle dégrafe le soutien-gorge, quitte le slip minimum.

En posant la main sur la porte de l'armoire, tout à coup l'idée lui vient qu'elle ne peut pas quitter ainsi son logement.
C’est un voyage, une expédition, il y a des choses à préparer, des objets à prendre, des courriers à faire, des amis à prévenir. Il faut imaginer un plan, si elle débarque ainsi elle n'aura jamais accès à ce bureau qui semble mieux gardé que la forteresse de Hautefort, que le château de Gaasbeek. Et l’homme, quelle réaction attendre d’un homme que l’on surprend ?

Elle s'assied. Se relève. Fait quelques pas. Elle va à la cuisine se servir un café, elle s'assied sur cette vieille chaise qui lui vient de chez sa grand’mère, se penche vers l’arrière, bascule un peu, hop, elle pose ses pieds sur la table et ferme les yeux.


Ça y est, elle se relève promptement. Elle sait ce qu'elle va faire. Elle enfile le premier jean qu'elle trouve, un pull, attrape son sac et les clés de la voiture. Elle va aller acheter ce qu'il faut pour mettre ça au point. Elle sourit en descendant les marches, tire la porte, la voici dans la rue, elle avance jusqu'à sa voiture. Elle sourit, en elle-même de ce à quoi elle pense. Tout en roulant, elle se moque d'elle-même.


(peut-être une meilleure lecture chez http:xianhenri.be ?)

15.11.07

Date de la poste.

Le mot presque anonyme lui est parvenu douze jours plus tard, Elisabeth ne pensait peut-être plus à celui à qui elle avait écrit.


Le secrétariat des éditions du Soleil a bien enregistré votre courrier sous le numéro HB524 que vous voudrez bien rappeler dans vos courriers ultérieurs.

Le service du courrier des lecteurs.
Marguerite Duchênois.

29.10.07

Dix jours plus tard

Cher Monsieur Belle,


Je vous remercie pour votre réponse, d'autant plus que c'est de votre main « propre » que la missive m'arrive. Comprenez mon émoi. Je ne sais si les dessous que je porte, si rarement il est vrai, n'en garderont pas la trace.

Je ne crois pas au hasard Henri, vous permettez n'est-ce pas que je vous appelle Henri ?

Concernant mon langage, il est vrai qu'il est plus adapté, aujourd'hui, aux jeunes gens qui fréquentent mes cours. Je vous promets d'y faire attention à l'avenir, mais une promesse est faite pour être oubliée, n'est-il pas vrai ?

Qu'est-ce que j'apprends ? Seriez-vous homme à vous décourager à la moindre contrariété, ici les kilomètres à parcourir. Cela étant je note tout de même à votre lecture, que vous êtes plus prompt à vous déplacer à Rome que dans le Nord de la France. Il est vrai que l'on a pour réputation la froideur du climat.

Vous m'en voyez désolée. Vraiment. Que n'aurais-je donné, non, offert ! pour vous rencontrer.

Je resterai cependant votre secrète dévouée,
Elisabeth Kubly

17.10.07

En guise de réponse

Mademoiselle Kubly,


Le plaisir physique étant dans la nature, il me semble être connu de tous bien qu’ayant rang subalterne aux yeux des amants doux, des politiciens et des comptables voire de quelques mégères de salon qui ne palpitent que pour le Nasdaq et le Cac40. Certaines vertueuses ont presqu’oublié les plaisirs charnels, je vois que vous n’êtes ni vertueuse ni avare, je sais combien coûte l’achat chez mon éditeur de la collection complète de mes ouvrages (qu’il se garde d’ailleurs bien de me rémunérer à leur véritable valeur).

J’ai donc, Chère Kubly, bien reçu votre courrier, que le hasard de mon passage au secrétariat y soit pour quelque chose et mon désir d’être au cœur de tout ce qui me touche pour sincère, qu’importe, j’ai trouvé votre mot, fait chercher les précédents et les ai soigneusement lus.


Pour une maîtresse d’Université, je vous trouve le langage un peu vert mais sans doute est-ce là une mode comme une jolie voiture est chose nécessaire aujourd’hui au luxe d’un jeune homme.


Quand je vous dirai que je rentre de Rome, que Marseille me semble fade, vous comprendrez que je vous réponde, la fréquentation des Italiennes aide à la compréhension des langages directs, moins accentués que sur la plage du Prado mais tellement troublants.


Me voici à faire le joli cœur, pour vous décevoir, il ne sera guère possible de nous rencontrer, je vois que vous habitez le Nord, je suis du Sud. Je suis invité cette semaine chez la comtesse Curiale que je ne peux éviter, elle m’aide dans quelques revers de fortune.
J’aurai cependant plaisir à entendre votre réponse que j’image prompte, vous semblez de caractère !


Veuillez recevoir, Chère Kubly, un bouquet de pensées

Vôtre Belle Henri, auteur.

16.10.07

Mercredi

Mercredi


Cher Monsieur Belle,


Bien sûr je n'ai pas eu de réponse. Évidemment ! À quoi m'attendais-je ? Je me dis que je vais me replonger dans « Les fous de Baalbek » ou « SAS à Istanbul », même s'il est à haïr, autant que l'auteur d'ailleurs qui prend ses lecteurs pour des cons. Mais n'êtes-vous pas en train de faire pareil. Me prendre pour une conne ? Au moins y trouverais-je des pages passionnantes. Comme vous ce Devilliers a toujours été très préoccupé des femmes, il a toujours fait la chasse au bonheur, ce qui dans son langage veut dire séduire peloter pénétrer, pas d’autres buts dans la vie !


Oh ! Est-ce moi qui ai écrit ces mots ? Aurais-je tout oublié de mon éducation stricte et mes règles de bienséance ? Celles-là mêmes que j'oublie encore en vous avouant mon envie irrésistible, comme vous, irrépressible, de vous rencontrer, tant que je n'ai osé parler de cela à quiconque, je n'ai pas même consulté le grand catalogue des Éditions du Soleil pour savoir si vous aviez écrit autre chose que ce que j'en connais.

Mais je veux rencontrer celui qui m'a ébranlée, touchée et émue, fait partager joies et peines, richesses et clins d'oeil à une société en délire, la nôtre. J'ai adoré l'histoire intégrée des cosmonautes, la référence à Javert, les mots rares (qui d'autres oserait écrire aujourd'hui : abaca, diurèse, évagination, parler de Berchtesgaden, de Gary Cooper, de Florianopolis, dire de son héros qu'il s'habillait à la six-quatre-deux ?)

J’ai redécouvert le plaisir des mots le bonheur des mots, je veux découvrir l’homme. Je veux savoir si ce que vous me faites ressentir à la lecture de vos livres, à leur contact, ces sentiments divers, oscillant entre désir, plaisir, exaspération, voire frustration de ne pouvoir caresser que vos mots, seraient les mêmes face à vous. Pouvoir me trouver dans vos yeux, lire sur les traits de votre visage, caresser vos mains, apprendre les lignes de votre corps, les effleurer, les sentir, les toucher, avoir un échange, vibrant à votre lecture, au frôlement des courbes de votre corps ? viril ! comme je peux l'être avec l'arrondi de vos lettres, pouvoir ressentir une réciprocité. Pourrais-je vous plaire ? Est-ce que je vous plais dans mes correspondances ou vous importunent-elles ? Est-ce que je vous attire comme vous m’aimantez ? Est-ce que mon élan ici inavouable trouvera un écho ?,

Faites vous des pauses dans vos récits pour assouvir le désir que provoquent les mots ? Et si c'est le cas, est-ce à moi que vous rêvez ? Je me demande parfois comment notre rencontre pourrait être. Serait-ce une collision, une rencontre où chacun de nous se reconnaîtrait immédiatement ou serait-ce un long moment d'observation ?
Puis-je oser encore ! Je préfère nettement le choc de l'affrontement, brutal, nous aurions tout le temps de nous parler. Je monologue, j’attends le dialogue. Ne l’avez-vous pas cité : L’amour est la seule passion qui se paye d’une monnaie qu’elle fabrique elle-même.

Ma rue est pleine de gens, ma vie est encombrée de personnes revenues à l’ère glaciaire des sentiments, la sentimentalité nigaude voire larmoyante ne manque pas mais elles aiment le pathétique de pacotille, l’aluminium et le plastique.
J’ai le cœur enrhumé.

Comment finir, comment être lue, vue...
J’attends de vos nouvelles, Cher Monsieur Henri Belle.


Elisabeth Kubly

15.10.07

Lettre d'éditeur ...

Bonjour,

Je ne sais pas si vous aurez ce petit mot. Je viens de terminer la millième lecture du « Rendez-vous à Colmar », oui, je dois bien l’avoir lu autant de fois depuis que je l’ai découvert chez un bouquiniste. J’ai pensé aussitôt, je vais descendre, cet homme si distingué n’aura pas manqué me répondre.

Je remonte l’escalier, l'enveloppe dans la main droite, la gauche, fébrile, décachette. Quelle impatience. C'est la réponse à ma seconde lettre, oui, je vous ai écrit deux fois. Dans ce deuxième pli, j'ai mis plus de conviction moins de sentiments, et j'ai aussi menti. Mais, qu'est-ce que mentir si c’est pour servir ses intérêts personnels. J’emploie, des mots que vous avez fait prononcer par votre héros Henri Lardu dans le deuxième tome de ses aventures américaines. Vous voyez bien que j’ai tout lu de vous, enfin peut-être, cela dépend du libraire de mon quartier, est-il bien fourni par votre éditeur.
Éditeur !

Voilà, j’ai écrit à une maison d’édition alors ...

J'avais hâte de découvrir cette réponse. J'extrait le feuillet, le déplie, et je le lis.
« Et merde ! » Pas encore. Encore un refus. Je rate la marche, je me cramponne à la rampe. Je rentre chez moi, furieuse, j'envoie voler mes escarpins dans l'appartement. Je me laisse tomber dans mon sofa, en regardant la lettre. Je la lis, la relis, la relis, ... éditeur ! mais oui, vous ne savez rien de ceux qui vous écrivent, votre éditeur filtre tout, s’empare du courrier, vous êtes intouchable.

Éditeur ! Comment n’y ai-je pas songé ?

Ce courrier-ci vous parviendra, j’en suis certaine, je trouverai l’adresse correcte et vous me répondrez. Que je me présente, tout de même, pour le cas probable où ma première lettre ne vous aurait pas été communiquée. Je m'appelle Elisabeth Kubly, je vis à Colmar, j’enseigne à Strasbourg, je ne sais si cela m’intéresse, ma passion est l’aquarelle mais on m’a dit qu’il fallait faire des études, des bacs plus malgré que j’en dise que cela ne mène à rien; je veux dire ni l’aquarelle ni les plus du baccalauréat. On ne se gêne pas pour me le dire. Mes parents, habitent Neuf-Brisach après avoir été leur vie entière dans des camps militaires en Allemagne. Je dois avoir un frère qui traîne ses godillots entre l’équateur et le tropique le plus au sud. Si je m’écoutais, j’irais vivre sous les ponts, je serais artiste mais je ne sais que vivre dans la vie des autres, par paresse sans doute.

Vous comprendrez donc l’importance de l’entretien que je sollicite, apparaître à vos côtés face à ma classe...

Qu’ai-je à raconter ces délires que je vous remercie d'oublier aussitôt, de ne pas me répondre et de me laisser telle que je suis certainement : une sorte d’évaporée.

A vous de savoir. Sinon, je vous rappelle l’adresse où vous pouvez m’écrire : Elisabeth Kubly, Logis 109 « der Storch», rue de Turenne, Colmar 68000.

10.10.07

Un autre jour

Lundi

Chère Elisa,


Je te remercie pour le moment agréable que tu m’as fait passer au téléphone. Entre femmes, n’est ce pas...


Oui, j’ai retrouvé aussi dans les caisses que nous avons dérangées plusieurs articles consacrés au « patron » et à sa jeunesse ici à Marseille.

Certaines maisons ou certains lieux qui se rattachent intimement à la vie de Henri Belle et qu'il a décrits dans la " Vie d'Henri Lardu ", ainsi la cathédrale La Major, imposant édifice, bâti, sur le site du temple de Diane la Grande, entre 1852 et 1893 dans le style Byzantin par Léon VAUDOYER qui en dressa les plans et Henri. ESPERANDIEU qui éleva les dômes sont évoqués longuement dans les biographies que plusieurs universités lui ont consacrées.


Il y a aussi quelques anciens magazines, tu seras surprise peut-être de savoir que tu avais fait la une de Noir & Blanc et que plusieurs photos de toi toute nue ont été publiées par Voilou, je suppose qu’elles ont été faites par des paparazzi lors de votre escapade à Ibiza.


Il y a encore un exemplaire numéroté de ce « Rendez-vous à Colmar » auquel tu semblais tant tenir.
Et des tas de petits papiers annotés, tu sais comment il est, toujours à saisir une idée au vol, à griffonner, jusqu’à sur les nappes en papier des pizzerias. Tiens ici, un buvard se lit à l’envers, l’encre pochée dit : Je n'osais pas prononcer son nom; si quelqu'un la nommait devant moi, je sentais un mouvement singulier près du coeur, j'étais sur le point de tomber. Il y avait comme une tempête dans mon sang. On retrouvera sans doute la phrase dans un prochain ouvrage bien que pour le moment il soit à composer maints discours que ses amis politiques vont citer à l’Assemblée.


J’ai bien aimé ce que tu m’as dit quand j’ai annoncé que j’allais publier une partie (voire tout) de cette correspondance sulfureuse. Je me permettrai d’y ajouter des petits points d’ancrage pour ceux qui dériveraient - c’est facile avec un romantique et une chienne en chaleur, sais-tu qu’il t’a surnommée comme cela ! Donc tu m’avais dit : Tous ces mots sont les miens, sans doute ai-je pu faire des omissions dans les faits, des transpositions, des erreurs; mais aucune menterie sur ce que j'ai senti ou sur ce que mes sentiments m'ont fait faire. Je supplie le lecteur, si jamais il s’en trouve, de se souvenir que je n'ai de prétention à la sincérité qu'en ce qui touche mes impressions intimes, sans accorder grande confiance au fond dans les jugements que j'ai pu décrire. Il n’y a de vrai chez moi que les sensations, que ce qui m’a tenu du cœur aux tripes.


J’ai été amusée et séduite par cette correspondance qui est bien celle-là, celle du cœur, celle des tripes ! Et j’aime beaucoup les commentaires que tu m’en as donnés, au fait, je t’aime bien tout entière, Elisabeth. Une première lettre rejetée ne t’avait pas découragée.

9.10.07

Lundi ...

Lundi
Chère Elisa,

Je t’avais écrit la semaine dernière une lettre restée à ce jour sans réponse, tiens, je te joins un bien curieux courrier, n’était-il pas un peu menteur ? un peu truqué ?, c’est la première lettre qui était dans la chemise rose sous le somptueux titre écrit à la ronde : Etrang’elle.

Monsieur Belle,

Magnifique, vous étiez vraiment et verve et tout à votre avantage à l’opposé de votre interlocuteur qui si brillant qu’il soit avait l’air bien fade.
Ce face à face avec un maître de conférence que vous avez bien remis à sa place lors de votre passage à la télévision, hier soir, a réellement créé en moi une grande émotion.
Déjà tout ce que j’ai lu de vous, et en particulier le très beau « Rendez-vous à Colmar » m’a interpellée, et là, je vous ai senti tellement en symbiose avec votre œuvre, vos livres me parlent, parfois me heurtent mais me touchent toujours profondément.

Enseignant la littérature à l’Université, j’ai présenté plusieurs de vos titres à mes élèves, mais quel merveilleux cadeau serait-ce de les leur faire découvrir en même temps que le maître lui-même. Adepte totalement convaincue à la fois de votre style et de la philosophie développée dans l’ensemble de vos ouvrages, j‘ose espérer que vous accepterez de nous nous honorer de votre présence en nous rendant visite, à mes élèves et moi-même.
Certainement nous pourrions organiser un rendez-vous « conférencier » avec plusieurs autres collègues et leurs classes.

Je me tiens à votre disposition pour convenir des modalités de cette réunion à la date qui vous agréerait le mieux dans un emploi du temps que j’imagine fort bien très chargé.
Je suis votre dévouée,
Elisabeth Kubly.


Bien entendu, le secrétariat ici fait un barrage usuel aux groopies et une lettre de fin de non-recevoir t’avait été adressée, ne le prend pas mal, c’est – et tu le sais maintenant, toujours ainsi que cela se passe avec notre grand homme.
Je t’embrasse et c’est avec plaisir que je te reverrai dans les parages.
Bisous soutenus
Marguerite.

7.10.07

Un mardi, ...

Mardi
Chère Elisa,


Comme tu le sais, Henri a décidé de déménager le bureau, l’affaire se fera en deux temps, nous quittons le vieux bâtiment de la rue neuve Sainte Catherine pour un plateau moderne quelque part près du palais des congrès de Strasbourg. Passer ainsi de la jungle des rues tombées dans la mer Méditerranée à une ville dont mon seul souvenir actuel est la place du Corbeau et un restaurant où l’on me servit une infâme bouillasse de choux blancs est un peu stressant.

Je ne devrai pas m’y faire longtemps, heureusement, Henri m’a assuré que ce bureau n’avait de raison d’être que pour y régler facilement des problèmes européens de publication, car, sans doute l’as-tu appris par la presse, Henri va se lancer dans l’édition internationale, c’est pour cela qu’on déménage, le « pratique » dans la capitale de l’Europe et le « courant de pensée », un peu plus tard à Amsterdam, sur le Herrengracht paraît-il.


C’est en rangeant les cartons dans des petits conteneurs à roulettes, c’est facile pour le transport, que j’ai découvert une pile de chemises roses qu’Henri avait déposées derrière l’étagère au fond du couloir des archives. Sacré Henri, surprenante Elisabeth !

Cachottière !

Bien évidemment, j’ai ouvert et feuilleté chacun des dossiers, j’ai tout lu, ce qui m’a pris l’après-midi entière et trois heures sup que je facturerai d’ailleurs à ce cher Henri, je ne m’attendais pas à trouver tant de mystère derrière mon autoritaire et très gentleman patron et autant de fougue, de verve, de brutale sensualité dans le courrier que vous avez échangé.

Je m’étais bien douté, lorsque je t’ai vue débouler un matin dans l’office marseillais que « quelque chose » était arrivé entre toi et Henri, mais du diable m’emporte si j’ai imaginé un seul instant cette passion dévorante. C’était donc cela tes humeurs massacrantes, ta fuite un autre matin vers cet Ibiza où je te sais quasi nue offerte au soleil la journée durant. Tu as bien de la chance, moi, je vais continuer l’emballage, le déménagement, le rempotage dans la ville libre royale, trop germanique pour moi qui adore, tu le sais, Saint Lazare et le vieux port, Sormiou et les calanques, l’aïoli et le rosé d’ici.

Je te laisse, « il » vient de passer dans le bureau et tu sais ses regards, cette arme puissante qu’il utilise abondamment, pouvant ainsi sans mot dire aussi bien mépriser qu'adorer.


Je t’embrasse, chère ancienne et fugace collègue, à bientôt.

Marguerite dite Némo (c’est « lui » qui avait inventé ce mot sinistre : personne !), 26 ans, alcoolique homosexuelle abstinente depuis 17 mois.
(Grâce à la découverte de cette correspondance, pour la première fois depuis des années, je me surprends à sourire, à rire et à aimer les autres).

2.10.07

un mardi d’avril

Il y a deux voies convergentes, une imaginative hors cadre et un brave garçon qui écrivit : Note de l’auteur : Non, c’est trop cucul.Et pourtant je ne parviens pas a saisir le style " Harlequin" Je ne peux pas aller plus loin. J’arrête. Excusez moi.
Et la réponse de Xian :
Si tu le permets, je vais m'y essayer en deux temps avec le même texte -avec le même scénario envoie-moi ou non le feu vert et si oui, disons ... pour lundi, non, mercredi semaine prochaine parce qu'il faut tout de même que je relise un passage ou deux du Veuzit ou similaire que je dois pouvoir dénicher dans le grenier ...


Le temps a passé et la porte du grenier est restée close. Alors, est revenue l’idée de l’écrivain et de l’amie lointaine, la lectrice inconnue ...
Et de se rappeler qu’il y avait eu une correspondante aux feues Éditions du Soleil ...



Préambule (deuxième, ce serait donc une sorte d’avant-propos dans le propos)
La correspondance publiée ici semble être née de la nécessité pour l’un et l’autre des amants (car on sait qu’ils furent amants) d'exprimer que les choses sont ce qu'on en fait, et que l’érotomanie peut-être une source prodigieuse de bienfaits.
Parfois, la violence des propos en ébranlera certains, en choquera quelques unes mais un amour ne peut être limité par des cachotteries intellectuelles ou pseudo-légales. Bien entendu Henri et Élisa Kubly existent, il n’est donc nul besoin ici de mentir comme des arracheurs de temps et d’imprimer l’avant-propos classique : Ceci est une œuvre de fiction agnia gnia agnia gnia .... bonne lecture bientôt .....

La crainte de susciter l'ennui chez le lecteur est aussi un point commun aux deux auteurs, qui vous demandent gentiment d’user de votre droit de réponse en imprimant vos remarques au verso du document avait écrit en prémisses Laid Iteur. L’auteur étant célibateur, point de cajoleries, si cela ne vous plaît pas, émilez de suite !
(henribelle@skynet.be)

1.10.07

Pas d'affolement

Prévu pour ce lundi, allons-y à petit pas et lisons le préambule ci-contre.

28.9.07

Henri Belle (annonce)

Le roman autobiographie (dit-on) de Henri Belle publié ici dès lundi sous forme de feuilleton.

Enfin, c'est ce qu'on a pu lire là : http://jemappellehenri.skynetblogs.be/post/5035623/henri-belle

8.5.07

Loft 3


Lecteurs de la Dépêche (pour s'abonner : écrire à xian arobase xianhenri.net







Loft Story Nomix 3

3.5.07

Lecteur de la Dépêche ?

Voici la page deux de votre Tintin Loft Story (Nomix)

4.4.07

Que pourraient être ces objets que détient Henri ?



Pour savoir de quoi il s'agit, ...

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Thème pour 2007 : Les mémoires.